Il y a 200 ans, Chigy

Par Jacqueline Simonnet

Il est difficile de retrouver les origines de notre village. Cependant les pierres polies, trouvées sur le finage, notamment entre Chigy et Vareilles, sont les témoins d'un passé paléolithique et néolithique.


Ciseau partiellent poli trouvé sur le finage de Chigy.
On a trouvé aussi un broyeur spérique (st.,  des Acquineries), 3 hachettes (une en pierre noire, une en pierre verte, une en pierre jaune granitée vert clait en provenance du lieu-dit  la Rue-d'Oscry). 
ref le Sénonais préhistorique d'Augusta  Hure
Dans l'Itinéraire d'Antonin, cette voie fait partie du trajet de Honfleur à Troyes en passant par Sens. Après  Pont sur Vanne on la retrouve entre la route actuelle et la rivière où elle ne tarde pas à tourner la colline de Chigy. Traversant à gauche la route au hameau de la Grenouillère, elle suit la direction d'un ancien chemin dit des Herminats qui conduit au haut des vignes de Foissy.
ref. le Sénonais gallo-romain d'Augusta Hure

De la période gallo-romaine restent les traces du "Chemin des Romains", au bas de la colline, parallèle à la route nationale.

Autre empreinte du temps passé, les terres extérieures à la ferme Métaut-Gangloff et au rû des Sièges laissent apparaître une motte qui, dit-on, de génération en génération, serait l'emplacement d'un château, d'une époque incertaine (gallo-romaine... moyenâgeuse?)  Peut-être le saura-t-on un jour.



En 1276 notre pays s’appelait encore CHIGIACUM.... Au XVIéme siècle CHYGY, parfois SIGY.

Des XIVème et XVIème siècles: les archives de L'Aube nous apprennent:

- le 6 janvier 1309, Hynthier de Malo-Nido, écuyer, et sa femme Marguerite vendent au Chapître de l'Eglise Saint-Pierre de Troyes, leurs biens de Chigy pour 560 livres tournois.


- en MARS 1599, les Doyen, Chanoines et Chapîtres, de Saint Pierre de Troyes, seigneurie dudit Chigy, ont la Justice, Haute, Moyenne et Basse, la moitié des grosses dîmes de 44 arpents de pré et un moulin.

Les habitants leur devaient aussi deux jours de corvée par an, pour la réparation des chemins et pour faucher la rivière.

 D'autre part nous lisons sur l'histoire d'AIX EN OTHE

-En 1559, Louis Duroux, seigneur de Chigy, se marie avec Aimée, dame de Rigny-le-Ferron. Ils ont eu un fils, Juvenal Duroux, devenu à son tour seigneur de Chigy. Chigy devait donc être partagé entre plusieurs seigneuries.


conférence de la coutume de Sens (1787)

Louis XVI distribuant ses bienfaits aux pauvres (hiver 1788)

CHIGY, il y a 200 ans.

En 1788 il y a 28 millions d'habitants en France, dont les 9/10 sont des paysans. C'est dire si nos villages étaient peuplés. La vie y était très dure, la pauvreté a ouvert la porte aux événe­ments qui vont suivre.

De plus il fait très froid. Le curé Lengrand de notre paroisse, écrit: "Le 31 décembre 1788, deux enfants ont été baptisés dans la salle du presbytère vu la trop grande "rigueur" de la saison!" ...... "l'hiver a commencé le 24 novembre 1788 et a duré jusqu'au 22 février 1789. Il a été si rude que les Vignes ont été gelées ainsi que la majeure partie des blés et des noyers. Le froid a surpassé de 2 degrés celui de l'hiver 1709. Le pichet de froment s'est vendu 8 livres 17 sols et le seigle 5 livres 15 sols. Le vin de la récolte 1788 était très bon; pour celui de 1789, il y en eut peu et très mauvais."

Cette même année le 4 Mai ont commencé les Etats Généraux qui ont occasionné beaucoup de rumeurs parmi la France.

Autre calamité: les Loups: affamés et parfois enragés. "La côte aux loups" reste témoin de cette histoire.

EN 1789 Il y a 277 âmes à Chigy. (presque cent ans plus tard il y en aura 512.)

Le premier Maire, bourgeois, de son état, (et non pas de nom) est alors Monsieur Ruin (ou Relin? ]

LES NOMS: On trouve deux très grandes familles Brûlé et Lhoste et aussi des Bourgeois, Chaudin, Collet, Couard, Mesnil, Morvan, Relin, Rothier etc... familles encore connues ou avec des descendants.

D'autres Fayolle, Sevanne, etc.... complètement disparues.

LE VILLAGE, LES RUES. La paroisse était composée de 80 feux et était assujettie aux entrées de vin. Ces charges ont été le sujet principal du Cahier de Doléances de Chigy, signé par:

Pierre Brulé, syndic municipal
Martin Boudier, greffier municipal
Louis Lhoste, député,
Pierre Relin, député,
Pierre Chaudin, Paul Couard, Jean Mesnil, Antoine Bonabau, Legrand, Landry, Jean Brulé, Pierre Lehup, Edme Picon, Richebourg, greffier en l'absence du juge ,
Dufois, lieutenant en la Mairie (ce dernier propriétaire de deux fermes au village, dont celle du n°34 grande rue, était chirurgien à Sens.)




Chigy n'avait pas le même visage. Citons deux exemples en ce qui concerne les rues.

1/ la rue de la Cour Fusée n'existait pas. Cette surface, plus la maison de Mr et Mme Usvald (26 grande rue) et celle de Mr et Mme Antonius ( 5 rue de la Cour Fusée) étaient la ferme Chaudin (ancêtres des familles Bourgeois et Rothier). Après l'incendie de la grange un droit de passage a été créé pour les riverains; depuis lors cette rue est devenue pratiquement communale.

2/ L'atelier et la maison d'un maréchal-ferrant ont été démolis pour la construction du hangar Couard. La cour du café et de l'épicerie formait, avec l'espace autour de ce hangar, un passage communal.

UNE PARTICULARITE: les fossés, tracés autour du pays, de la Vanne à la Vanne, de main d'homme, par la rue du Guichet, et naturels, par le rû des Sièges (le chemin de Ronde).

Les fermes avaient presque toutes un grand portail, parfois surmonté d'un pigeonnier, et, à côté de ce portail, une petite porte appelée "porte cavalière". Ceux qui restent gardent le caractère du pays.

Les titres de propriété mentionnent souvent "maison avec toit de paille". (on en trouve encore en 1865.)

Y a-t-il eu des Portes d'entrée au pays ? L'une au carrefour Les Sièges - Vareilles , l'autre au Pont de la Vanne. Dans notre enfance nous entendions les anciens parler de la PORTE D'EN HAUT, et de la PORTE D'EN BAS: ces expressions sont d'ailleurs mentionnées sur certains titres de propriété, et confir­meraient l'existence d'un mur d'enceinte au moyen âge.



La Place publique, décalée par rapport à la place actuelle était comprise entre le cimetière, l'auberge, la ferme Couard et la grande rue.

L'église, sans clocher, était sensiblement au même endroit que celle d'aujourd'hui, et entourée du cimetière. Une date au-dessus de la porte latérale: 1647 ne correspond certainement pas à la date de sa construction. Elle fût incendiée en 1860. Après plans et délibérations pour la réparation, l'affaire n'a pas été suivie. Il fut décidé de sa reconstruction par l'architecte Lefort. Elle sera inaugurée le 20 septembre 1868.

Sur la rive droite de la Vanne, au pied du pont de pierre, côté terrain du boulanger, se trouvait le lavoir.

Notre commune avait deux hameaux: La Grenouillère et Les Clérimois: ce dernier devenu commune distincte le 29 MAI 1888. Six communes : Chigy, Foissy, Pont-sur-Vanne, Fontaine-la-Gaillarde, Voisines, Lailly, lui abandonnent 1160 hectares.

Le 3 juillet 1887, le propriétaire de Belle-Vue demande avec instance que sa ferme ne soit pas distraite de la Commune de CHIGY, donnant pour raison "que tous les ans ils verront leurs impôts augmenter dans une notable proportion". Il n'obtiendra pas satisfaction.


La Grenouillère

La rue de l'Abreuvoir, du pont au moulin, et la rue du Moulin qui allait du moulin à la grande rue, étaient plus étroites: la première parce que la Vanne était plus large, l'autre à cause du cimetière.

LES COMMERCES

- plusieurs épiceries,
- plusieurs cabaretiers,
- tout laisse à penser qu'il n'y avait pas de boulange. Chacun faisait son pain. A notre connaissance il ne doit rester qu'un ou deux fours, ici.
- et bien sûr les colporteurs qui vendaient les bonnets, les chansons, les nouveautés, et apportaient les nouvelles.


LES METIERS

On retrouve rarement des cultivateurs, mais des laboureurs et des vignerons. Toutes les collines côte des Clérimois, Moque­ Bouteilles, jannières à la terre aride, étaient plantées de vignes. Le phyloxéra en 1898 a provoqué l'abandon de cette culture.)

On semait aussi le chanvre dont la récolte aidait à solder les créanciers et payer les impôts.

CHIGY avait, comme chaque pays de la Vallée de la Vanne, son moulin (mentionné en 1599). En 1789 il appartenait encore au Chapître de Troyes. En 1793 il est vendu à Jean Mesnil; puis la famille Brulé (ancêtre de Mme Usvald et de Mr Brulé Flavien) en sera propriétaire jusqu'à son expropriation par la Ville de Paris en 1866, mais en restera  locataire de 1866 à 1872. Le moulin a été démoli en 1873 et l'usine élévatrice construite, en partie, avec les matériaux de démolition.



D'AUTRES METIERS

- une tuilerie à la Bardoue (les Clérimois)
- un sabotier un charron
- au moins 2 maréchaux ferrants desnommés Collet, dont le dernier, bisaieul de Mr Usvald, exerçait au 26 grande rue. Il a vendu son fonds à Victor Bloch en 1880. Ces deux artisans n'étaient autres que les prédécesseurs de la famille Petit.
- un bourrelier (le dernier connu le père Maltete,
- une sage femme
- des couturières
- un perruquier (le dernier un oncle des Joannis}
- En 1792 on trouve un Jean "de la Voie", tailleur, sans doute un ancêtre de "Gute" (Auguste Delavoix} "le Tambourineur" comme l'on disait, qui doit être encore dans la mémoire de certains.

Antérieurement à ces dates, en 1758, il y avait un notaire, Maître Legrand.

Tout ceci nous laisse à penser que le village devait être assez important et animé, malgré sa pauvreté.

Quelques dates du XIXème siècle

1856 inondation dans l'Yonne

1870 arrivée des Prussiens le 11 novembre. A leur dernier passage ils couchent une nuit dans l'église.

1877 la Ville de Paris construit le pont de pierre sur le canal qui coûte 19.000 francs. Le lavoir , ainsi que le pont noir et celui du ru des Sièges, trottoirs et caniveaux sont aussi à leur charge. La commune. leur a vendu 17 ha.50 de pré pour 70.000 frs


Le pont
L'Eglise et le tilleul

Entre 1870 et 1900, un horloger : Mr Véron.

1886 plantation du Tilleul

1893 grande sècheresse, remplacement des cloches de l'Eglise

1898 projet de construction : Ecole, Mairie, Logement de l'institu­teur par l'entreprise Perrache, pour 18.110 frs.

1904 inauguration de l'ensemble. Petit détail: achat d'une pendule pour la Mairie; pour 45 frs-or (soit 1000 frs d'aujourd'hui si l'on calcule par rapport à ce métal.)


La mairie et l'Ecole